Extrait d'un roman

EXTRAIT DE « ERBMA DEL BATAL » ou « LA TABLE d’AMBRE » publié chez EDILIVRE (www.edilivre.com)
D
ans la salle d’étude il n’y a aucun bruit. Le moindre raclement de gorge dérange et les têtes se tournent. La salle est immense, un peu sombre. Mais chaque élève dispose d’une lampe individuelle réglable pour éclairer son travail.
Les vitres intérieures, haut placées, ne permettent pas de voir les nonnes passer dans le couloir. On distingue à peine des vagues de lumière où flottent le noir et le blanc.
Hormis le sol aux larges dalles brunes, tout est boisé comme dans un tribunal , calfeutré, naturellement insonorisé.
Sur l’estrade, derrière son bureau en chêne, la religieuse sensée surveiller est plongée dans une lecture.
Le temps de l’étude est long : une heure et demie !
Au bout de vingt minutes, j’ai fini. Que faire ?
Je regarde discrètement les dos courbés, parfois j’aperçois un œil et je cligne en signe de reconnaissance mais il faut vite changer de posture : la sœur, là-haut, a des antennes, elle renifle la connivence et se lève en souplesse, sa robe fait un « FLOP » et la voilà qui déambule dans les allées, les lunettes au bout du nez, les yeux écarquillés ; un léger sourire narquois lui donne un petit air diabolique.
Mais nulle parole n’échappe à quiconque. Le seul dialogue, en ce lieu d’étude, est télépathe. Sœur Pascale s’en retourne. La voilà de nouveau assise, concentrée dans son livre. S’est-elle vraiment levée ? Ai-je rêvé ? Je suis pourtant bien consciente !

Mon impatience me tarabuste. Je n’ai même pas envie d’aller aux toilettes. Machinalement je prends mon stylo plume et j’ouvre un cahier vierge. Il suffit d’un millième de seconde pour que le miracle se produise, ma table de bois s’éclaircit lentement. Je tiens ouvert le cahier de la main gauche. Je fronce les sourcils, j’avale ma salive. Je suis en apnée.
Le bois est devenu translucide et jaune, une lumière se répand à l’intérieur et illumine ma main, la feuille blanche m’appelle, je commence à écrire. Je suis seule à être concernée par ce phénomène surnaturel. Voici que les mots apparaissent, dictés par une force que je ne contrôle pas, c’est elle qui me domine. J’écris, j’écris, j’écris. Pourquoi ai-je déjà créé le titre ? Mystère. La table, sans doute : elle est si belle, chaude, douce !
Le titre est : « La Table d’Ambre » et si Ambre est mon prénom, il est clair que c’est aussi la matière magique de cette table : elle s’allume pour moi seule !
A la fin du premier poème de ce nouveau recueil, je voudrais relire mes strophes, mais la sonnerie électrique déchire l’espace et mon cerveau en ébullition.

Douloureusement, je ferme le cahier sans même me souvenir de son contenu. La réalité me brise. Mes amies me bousculent gentiment. Mireille, Claude. La table s’est brusquement éteinte. Je suis comme une naufragée qui regrette son île. Demain, je reviendrai.

Résumé :
Ambre a quinze ans, nous sommes en 1967. Sa scolarité la mène dans un pensionnat de religieuses, au Maroc, elle y restera une année scolaire. Dans l'enceinte de ce lieu dédié à l'étude et à la piété, Ambre découvre des choses qui choquent sa candeur! Mais c'est une élève brillante, elle seule sait ouvrir une table magique, où elle rencontre le mystérieux être et "la Vérité". Ambre va croiser des personnages aux mœurs particulières mais l'amour entrera lui aussi dans sa vie. 1968 est l'année de toutes les révolutions! Ce roman ésotérique est le fruit de l'imagination.
Biographie :
Marie-Céline CHOTTIN est née le 13 février 1953 à RABAT (MAROC). Peintre, musicienne, écrivain, karatéka, cavalière, et sirène l'été, elle cultive aussi l'ésotérisme et puise nombre de ses écrits dans les rêves. Le MAROC a légué à cette artiste une palette de sons et de couleurs infinie. Alexis CHOTTIN, son père, décédé en 1975, musicologue spécialiste de musique andalouse, serait fier aujourd'hui de son parcours. Après avoir publié un premier roman aux 2 Encres: "La maison vide" et figuré dans un recueil de nouvelles ("Le Centième Titre", également aux 2 Encres) elle rejoint aujourd'hui Edilivre.