À la fenêtre
Tu étais là, de l’autre côté de la fenêtre assise dans une causeuse rouge. Tu tenais un verre de vin d’une main et un livre de l’autre. Le vin était rouge, la couverture du livre, blanche. Il était visiblement passionnant : tu dévorais les pages les unes après les autres. Jusqu'à en oublier ton verre parfois : tu le levais pour le porter à tes lèvres, puis tu arrêtais ton geste, le déposais sur la table basse devant toi à côté de la bouteille.
Ta fenêtre étant ouverte, on pouvait entendre de la musique s’échapper de la pièce. Je me suis rapproché. De la musique instrumentale. D’après la sonorité et les arrangements c’était un disque récent. Mais je ne pouvais dire lequel: il m’était inconnu. Ce n’était pas de la musique classique, pas plus que du jazz à ce que je pouvais en juger. C’était un amalgame des deux genres avec en plus une touche contemporaine. C’était très intéressant et intriguant à la fois. Ma curiosité était piquée.
J’étais là à écouter ce que tu écoutais. Je n’osais pas trop regarder à ta fenêtre. Je m’étais même mis un peu à l’écart, dissimulé par un arbre, de peur que ton regard croise le mien et que tu soies effrayée. Appuyé au tronc d’arbre je rêvassais, bercé par la musique et la rumeur de la rue.
Après un temps, je m’aperçois que la musique a cessé. Je lève les yeux vers ta fenêtre : elle est fermée, le store abaissé. Visiblement tu es partie. Me suis-je assoupis ? Depuis combien de temps suis-je là ? Il est évident que j’ai dormi. Je ne peux dire combien de temps précisément. Cette notion m’a échappé, impossible à rattraper.
Les jours se sont succédés aux nuits. J’ai pensé sonner à ta porte. Aurais-je dû ? Certaines fois quand j’y repense, je regrette de ne pas l’avoir fait. Par contre à d’autres moments je suis convaincu du contraire.
Dans les semaines suivantes je suis repassé devant ton immeuble quelques fois pour entendre de nouveau le morceau de musique que tu écoutais la première fois. Mais à chaque fois j’ai joué de malchance : tu n’y étais pas.
J’y pense encore…